Deux mains la liberté

12/02/2023

Après le spectacle « Jamais plus » joué au théâtre des variétés, avec la pièce « deux mains la liberté », nous restons dans le thème de la deuxième guerre mondiale et de la résistance. C'est le fruit du hasard, et le hasard fait souvent bien les choses.

Berlin, 1939, siège de la SS. Le Dr. Félix Kersten (Antoine Nouel) se voit confier une mission importante : soigner Heinrich Himmler (Philippe Bozo) qui souffre d'un mal qu'aucun médecin n'arrive à guérir. Disciple du lama tibétain le Dr. Kô, par de simples impositions des mains et des manipulations, le Dr. Félix Kersten va libérer Heinrich Himmler de ses douleurs insupportables. Ce dernier reconnaissant lui offre son amitié. Comprenant l'influence qu'il peut avoir sur le nazi, le médecin aux mains miraculeuses lui propose comme honoraires des listes de personnes à libérer. Himmler s'exécute en transmettant ces listes à son secrétaire Rudolf Brandt (Franck Lorrain). Ce ne sont d'abord que quelques noms, qui au fil du temps se transformeront en plusieurs milliers de personnes. Mais comment entreprendre cette œuvre de bonté sans éveiller les soupçons, sans s'attirer pour soi-même et ses proches les foudres de la vengeance nazie, sans être tenté de rompre son serment d'humanité ?

En allant voir cette pièce, je ne m'attendais pas à assister à une œuvre aussi pédagogue, riche d'informations sur un pan de la résistance assez peu connue du grand public et qui s'est déroulée au plus haut sommet de la machine nazie.

Le texte dans son écriture, comme dans sa déclamation, est clair comme de l'eau de roche. Il va droit au but, sans fioriture et prend le public par la main dès les premières secondes jusqu'au baisser de rideau. « Deux mains la liberté » a le souci du détail à la fois dans le jeu et dans la mise en scène. Philippe Bozo est terrifiant dans son rôle d'Himmler au point d'en adopter les mimiques et le physique du personnage. Par une déclamation posée, une gestuelle tout en douceur, Antoine Nouel incarne quant à lui la figure rassurante du médecin. Entre ces deux personnages que tout oppose, Franck Lorrain tisse petit à petit des liens de complicité précieux avec le médecin pour parachever son œuvre bienfaisante, tout en feintant la fidélité à Himmler.

Le décor est glaçant par son code couleur dominant : rouge, noir, blanc. Des drapeaux nazis pendent de part et d'autre de la scène. En fond de plateau, le théâtre Lepic offre un mur brut peint en noir faisant office d'écran sur lequel sont projetés des repères spatiaux temporels mais également des extraits de documentaires ou de films d'époque. Les tableaux sont parfois entrecoupés du chant des partisans et une voix d'enfant énumère le nombre de personnes sauvées. En dépit de la gravité du sujet, des pointes d'humour viennent apporter un peu de légèreté à l'intrigue et une subtile rupture du quatrième mur permet au Dr. Kersten de prendre le public à part et d'en faire son complice. Cette pièce comporte également une grande dimension spirituelle, l'universalité des thèmes d'amour et de paix planant tout au long de l'œuvre.

Pour conclure, « Deux mains la liberté » est pièce juste, émouvante, riche d'enseignement, ayant pour message que la bonté peut-être une arme très puissante. Elle met en lumière l'humanité d'un homme qui, grâce à ses dons, a cherché à s'ériger en rempart contre la cruauté. Enfin, ce spectacle pourrait se résumer à la citation de James Oliver : « Il y a un plaisir plus grand que celui de tuer : celui de laisser la vie ».

Et maintenant, à vous de jouer !
Maria-Nella

De Antoine Nouel avec la participation de Frank Baugin
Mis en scène : Antoine Nouel
Avec : Antoine Nouel, Philippe Bozo et Franck Lorrain
Lumière : Denis Schlepp
Son et images : Philippe Bozo

PAN productions

Crédits photos : Christèle Billault 

Studio Hebertot

Du 14 octobre 2023 au 28 janvier 2024

Les jeudis, vendredis et samedis à 21h00

Les dimanches à 14h30

https://studiohebertot.com/spectacles/deux-mains-la-liberte