Maison close (chez Léonie)

21/07/2023

C'est dans le petit écrin du théâtre des Brunes qu'il nous a été donné rendez-vous, un rendez-vous secret et bien caché derrière de grands voilages bruns. En centre de scène « Madame Léonie », tenancière d'une maison close, fait ses comptes en femme d'affaires avisée. Autour d'elle gravitent ses filles un rien « grandes gueules » mais bienveillantes : Céleste, son bras droit, Victoire la fantasque et Fantine la sensuelle. Dans la maison de Madame Léonie, tout est pensé pour assouvir les fantasmes de tous ses clients. C'est d'ailleurs un jour important pour la patronne. Elle est sur le point d'accueillir une nouvelle venue qui pourrait lui rapporter gros, la jeune Louise rebaptisée Colombe pour l'occasion et engagée pour incarner le fantasme de la femme enfant. Il faut dire que ces temps ci la demande en chair fraiche est un marché qu'il faut conquérir mais la concurrence est rude et le métier n'est pas sans danger. Surtout depuis que les autorités ont décidé de faire la chasse aux maisons de plaisir qui ne seraient pas irréprochables. De la moralité à la syphilis les menaces sont nombreuses pour le commerce de Madame Léonie. Et il ne faudra pas plus qu'un simple accident pour faire voler en éclat l'harmonie de tout l'établissement et par la même occasion les rêves de liberté de ces pauvres filles.

Au-delà de l'intrigue, « maison close » met en lumière le quotidien de ces femmes éprises de liberté qui tentent de s'en sortir avec leurs modestes moyens. Mais entre les murs du bordel il n'y a pas de place pour les rêves et encore moins pour la lumière. D'ailleurs à cette époque que vaut la parole d'une femme face à un homme, et qui plus est que vaut la parole d'une prostituée ? Le public est absorbé par le destin de ces pauvres filles à qui la misère n'a pas donné d'autre choix que de vendre leur corps. Tantôt survoltées, tantôt rattrapées par leur réalité, les comédiens déploient toute la palette de leur talent pour emporter le public dans leur univers musqué.

Le décor est pensé comme une alcôve privée. En effet, cette pièce entretient le mystère et fait appel à l'imaginaire des spectateurs. De part et d'autre du plateau sont disposées de grandes tentures dans les tons ocre et marron. De petits escaliers de bois à cours, à jardin et en fond de scène mènent aux espaces de travail jamais dévoilés de ces filles perdues.

Concernant les costumes, chaque fille arbore symboliquement un corset d'une couleur différente sur une toilette en dentelle : le bleu pour Céleste la suave, le vert pour Victoire la libérée, le rose poudré pour Fantine la romantique et le blanc crème pour Colombe l'innocente. Madame Léonie porte quant à elle une robe aux motifs écossais telle une « chieftan » (chef de clan).

Mais que seraient ces filles sans la présence imposante des hommes ? Un comédien vient interpréter tous les rôles masculins du plus habitué de la maison à celui qui rêve de la faire fermer.

Les chorégraphies et musiques originales viennent parachever cette pièce pour lui donner un côté très pétillant et montrent le quotidien de la maison à toute heure de la journée.

Si vous avez toujours voulu lever le voile « avec pudeur » sur la vie quotidienne de ces filles de joie, foncez chez Madame Léonie. Elle saura vous mettre à l'aise.

Et maintenant, à vous de jouer !
Maria-Nella

Auteurs : Agnès Chamak, Odile Huleux
Mise en scène : Agnès Chamak, Odile Huleux
Interprète(s) : Ariane Carmin, Agnès Chamak, Fabien Floris, Montaine Fregeai, Maroussia Henrich, Taos Sonzogni
Chorégraphe : Lucile Künzli
Compositeur : Franck Lebon
Compositrice : Odile Huleux
En Scène ! Productions

Théâtre des Brunes du 7 au 29 juillet à 16h40 - Relâches : 10, 17, 24 juillet

https://www.festivaloffavignon.com/programme/2023/maison-close-chez-leonie-s33318/