Ce soir là c'est à la nouvelle Seine que j'ai rendez-vous avec mes ami(e)s Caroline* et Maurice* pour assister au premier stand-up d'Alex Jaffray et dont le thème principal du spectacle est la musique. Personnellement, je ne connaissais pas ce comédien, compositeur et également chroniqueur musical sur youpi... heu (pardon) télé-matin.
Après avoir descendu l'escalier nous menant dans les cales de la péniche... (oui parce que la Nouvelle Seine est un théâtre sur berge dont la salle est placée en dessous du niveau de la Seine), je suis prise d'effroi car je n'avais pas pensé à un minuscule détail. J'ai une oreille interne bien pourrie et le moindre roulis a l'effet immédiat de me faire dégobiller (amis de la poésie...). Surtout que la péniche est amarrée au 2 Quai de La Tournelle, juste en face de Notre Dame. Autant dire qu'en ce moment, il en passe des bateaux mouches bien chargés de curieux et dont les vagues provoquées par leurs passages viennent se fracasser sur la parois de notre théâtre flottant. Bref, au moment où les lumières s'éteignent, je prie Poséidon de m'accorder un cessez-le-feu.
Le spectacle commence et Alex Jaffray plante très vite le décor. A l'aide d'une boite à musique lumineuse qui fera office de chaîne stéréo, tourne disque, piano, trompette et boite à rythme, le compositeur-comédien analyse la musique sous plusieurs angles : ethnologique (la découverte de la première note aux temps de Néandertal), religieux (le risque de bûcher pour cause de diabulus in musica), animalier (la création des premiers instruments à l'aide de carcasses d'animaux), ethnique (la musique des noirs, la musique des blancs...). Tous les styles musicaux y passent : classique, jazz, rock, pop, tubes de l'été, variété, rap, électro et même la musique jouée par les Romanos dans le métro!
Dans ce premier stand-up musical plein d'humour, passionnant et passionné, le public fait le plein d'anecdotes sur le 4e art : comment Alfred Newman s'est rendu célèbre grâce à 30 petites secondes d'un générique bien connu ; pourquoi Jean-Sébastien Bach avait une drôle de coupe de cheveux ; pourquoi Nana Mouskouri a préféré la chanson au mannequinat ophtalmique ; comment une mélodie disco a-t-elle pu devenir un grand tube électro ; comment reconnaître un tube (non Maurice, ce n'est pas forcément parce que le banquier appelle le compositeur)... Alex Jaffray fait également la part belle à la musique de film, sa rencontre avec Ennio Moricone en étant le point culminant. Avec un humour subtil, le comédien sensibilise le public au fait que la musique peut-être un des décors principaux d'une scène et que si elle est mal composée, l'effet escompté tombe à plat. En effet, une simple variation de notes, de tons ou de mesures peut transformer radicalement une ambiance cinématographique. Le comédien n'hésite pas à illustrer son propos en rejouant une scène mortellement dramatique du Parrain sur une musique ambiance "pizzaiolo simpatico".
Mais la musique n'adoucit pas forcément le mœurs. En effet, Alex ne boude pas son plaisir pour nous dévoiler son aspect parfois "ennuyeusement-déprimant". De la petite mélodie à deux balles qui revient constamment dans la tête, des musiques d'attente téléphonique qui n'ont ni queue ni tête, de la vielle chanson pourrie qui rappelle l'ex tant aimé(e) et qui s'est barré(e), des paroles faussement poétiques et qui au final n'ont aucun sens... Dans ce chapitre en mode revers de médaille (ou plutôt de partition), le comédien pointe également du doigt les dérives commerciales liées à une exploitation musicale à outrance. Il n'hésite pas à donner de grands coups de métronomes sur des artistes contemporains qui massacrent notamment la grammaire française avec des concordances de temps qui font saigner les oreilles.
Pas besoin de réviser sa théorie de la musique ou son solfège pour aller voir ce spectacle. Alex Jaffray s'adresse à tous, et tout le monde pourra se reconnaître grâce à des références très populaires. En un peu plus d'une heure, le comédien met au diapason de son humour décapant quelques uns des plus célèbres musiciens/musiciennes et chanteurs/chanteuses : Sting, les Beatles, les Stones, Bob Marley, Piaf, Elvis Presley, Stone et Charden, Mozart, Joe Cocker, Rita Mitsouko, Vivaldi, Nirvana, Janice Joplin, Georges Mickael, Les Jackson Five, Jean-Sébastien Bach, Lady Gaga...
En résumé, dans ce spectacle le public en apprend beaucoup sur la musique tout en se bidonnant. Alex Jaffray a le génie de démocratiser encore plus cet art si populaire et qui nous accompagne à chaque instant. Le comédien lève le voile sur des anecdotes simples, drôles et parfois pleine de poésie et le public est au rendez-vous. Caroline était aux anges. Maurice, au taquet de ce spectacle, était ravi, et moi j'en ai oublié mon oreille interne et... j'ai pas vomi. Merci Alex! Merci Poséidon!
Et maintenant, à vous de jouer.
Maria-Nella
De et avec Alex JAFFRAY
Collaboration artistique : Jean-Christophe DOLLE
* les prénoms ont été changés
